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E la nave va...

On ne traverse pas l'Océan tous les jours...Un deuxième article sur cette expérience unique ne nous semble pas de trop.

Un mois après l'arrivée, les souvenirs précis s'estompent. On ne peut plus dire avec exactitude quel jour on a empanné, à quelle date on a pêché la première dorade, le moment précis d'un grain ou d'un mou... On retient cette impression de vivre dans une bulle hors du temps, ce sentiment d'irréalité, d'absurdité parfois ; si les villes sont un désert d'hommes, il en va de même pour cette immensité bleue, hypnotisante , qui nous fascine toujours autant , réveil après réveil. On se demande parfois ce qu'on fait là , sur notre coquille de noix, hors du monde.

Et puis on compte les miles, on espère la Terre.

Mais aujourd'hui, après un mois sur Terre justement, après l'assouvissement de nos rêves les plus fous (un steack, une glace au citron, une douche, des draps propres) , ce sont nos sens qui se souviennent.

D'abord, de ce bleu incroyable, profond, lumineux de l'Océan . Des couleurs du ciel au levant et au couchant, toujours dans les nuages, et de ces nuages qu'on observait, cherchant à deviner si l'on prendrait ou pas le grain sur la tête.

La nuit, pendant le quart, lorsque l'unique lumière artificielle était celle du feu de tête de mât et que, brusquement, les constellations d'une voûte étoilée splendide disparaissaient , on sentait l'air chaud du grain qui arrivait, le mou avant la tempête .

En écrivant cet article, je n'ai pas d'image précise de chacun de mes coéquipiers sur le pont, mais dma mémoire m'offre des scènes fugaces: un morceau de culotte dépasssant d'une veste de quart pendant une manoeuvre, les éclats de lampe frontale la nuit,le visage de Swann, abasourdi, en caleçon après avoir pris un torrent complètement inattendu sur la tête. Marie écrivant la liste des plats dont nous révions, Nicolas réparant le génois et préparant le balcon avant afin d'éviter les frottements de la voile.

Un souvenir très net est celui des sensations du réveil: le bateau bouge, il fait chaud, on sort de ses rêveries trempé de sueur et couvert de sel, sachant que dès qu'on aura retiré les boules quiès, on entendra à nouveau l'éternel bruit de l'eau sur la coque et des craquements du bois.

On sort ensuite dans une lumière aveuglante des tropiques , sur le pont ensoleillé. Le salut se matérialise alors sous la forme d'un sceau d'eau de mer fraîche qu'on se renverse invariablement sur la tête...et , selon la formule consacrée, ça fait trop du bien!

Et c'est ainsi que, de nouveau disposés à profiter des plaisirs de la mer, nous pouvons apprécier...la couleur des dorades coryphènes fraichement pêchées, les sargasses dans le solei. La houle, ces montagnes dont je ne pouvais détacher mon regard...Et bien sûr les poissons volants qui planaient dans les vagues, dans le bleu, en scintillant... (là nous avons aussi des souvenirs olfactifs...!)

Enfin , et c'est loin d'être la facette la moins importante de cette aventure,on a vécu une sacrée aventure humaine !

D'abord, nous avons eu la chance de traverser en même temps que nos bateaux-copains , et c'était vraiment des super moments d'échanger nos positions et des nouvelles tous les jours.

Et concernant l'ambiance à bord de Dremmwel , eh bien on est très contents d'avoir traversé ensemble. Sans surprise, ce n'est pas facile, même pour des amoureux et des amis de longue date, de vivre ensemble dans 12m par 4. Après quatre mois de voyages dont 17 jours de transatlantique, on se connait mieux et on apprend à vivre ensemble jour après jour.

D'ailleurs on est sympa, on vous livre en exclusivité la recette de la joie après une discussion émotionnellement chargée, une petite embrouille, ou juste un bon coup de bôme :

1) décrétez que c'est dimanche. Ca marche encore mieux si il fait gris.

2)(re) mettez éventuellement votre pyjama (ça fonctionnera pour les plus Swannesques d'entre vous) . Ca marche encore mieux s'il est 10h du matin.

3) Laissez libre cours à votre mauvaise hueur. Foutu pour foutu, dites vous que vos amis/collocs/coéquipiers vous aiment et que votre coup de gueule sera j'objet d'une histoire rigolotte à raconter un jour.

Ca marche encore mieux si vous pétez complètement un plomb.

4) Faites un gâteau très riche, voire une chantilly (à la perceuse ça marche admirablement), et si vous pouvez aggrémenter ce craquage alimentaire d'un , voire deux, voire trois épisodes de sériers, surtout ne vous privez pas. Ca marche encore mieux si vous vous vautrez bestialement dans un canapé avec un plaid et toute la panoplie adéquate à la glandouille...

Et voilà! Ainsi vous avez la recette du bonheur. Vous pouvez vous détendre en attendant le prochain article!

On sort

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